Le déodorant tel que nous le connaissons actuellement est en fait assez récent, il est apparu il y a une centaine d’années. Quoi ?? Mais alors les gens faisaient comment avant ? Ils ne sentaient pas bon des aisselles ? Et bien disons qu’avant que les publicitaires nous disent que sentir mauvais des aisselles nuisait à notre pouvoir de séduction, on n’y pensait moins :)
Voici dans les grandes lignes l’histoire du produit cosmétique le plus vendu au monde.
Avant le déo on faisait comment ?
Dans l’antiquité, nos cousins les romains camouflaient l’odeur de leurs aisselles en se mettant des petites poches remplies d’aromates sous le bras, juste après leur viré aux bains entre copains, pas vraiment pratique me direz-vous.
Dans les siècles qui suivirent l’eau étant accusée de rentrer par nos pores et de propager la peste, les gens ne se lavaient plus ou très peu, on utilisait alors du parfum (quand on en avait les moyens) pour camoufler notre puanteur. Car on parlait vraiment de puanteur, à raison d’un bain par an, l’odeur nauséabonde qui régnait dans les villes et mêmes dans les couloirs du château de Versailles, roi ou pas roi tout le monde avait le même nez et ça puait.
On peut dire que c’est grâce à Louis Pasteur et sa découverte d’un monde parallèle microscopique rempli de microbes que l’hygiène reprit du terrain. N’en déplaise à Napoléon qui quelques décennies auparavant n’hésitait pas à clamer à sa douce Joséphine “je serai là dans trois jours, ne vous lavez pas”.
Mais revenons à notre déodorant,
Qui donc a inventé le premier déodorant ?
Ou plus précisément à partir de quand avons nous utilisé un produit qui neutralise les mauvaises odeurs? Le mérite revient sans doute à Antoine Maille créateur de ces moutardes qui nous montent au nez. Il eu en effet l’idée ingénieuse de créer un “vinaigre de toilette” savant mélange de lavande macérée dans du vinaigre. Cela se passe au 18ème et c’est grâce à lui dira t-on que l’épidémie de peste de 1720 à Marseille aurait été éradiquée.
Sautons encore quelques années pour arriver en 1888, date à laquelle “Mumm” lança le 1er déodorant anti-bactérien sous forme de crème.
A l’époque les gens ne connaissaient pas les déodorants, et ceux qui en avaient vaguement entendu parlé pensaient que ces produits étaient malsains et non nécessaires. Et surtout, ils évoquaient un sujet tabou : la transpiration.
A cette époque on ne parlait pas des ses fluides corporels. Une bonne douche le matin, des vêtements amples en coton, un peu de parfum, et la plupart des problèmes olfactifs étaient résolus. Et pour ceux ayant une transpiration forte, une paire de compresses sous chaque bras faisait l’affaire.
En 1903 “Everdry” lança la 1ère crème anti-bactérienne ET anti-transpirante, mais la réticence du public, toujours frileux à parler des aisselles, était encore là.
Quelques années plus tard Edna Murphey, maligne, récupéra la crème que son père chirurgien avait concocté pour réduire la transpiration sur ses mains lors de ses opérations. Efficace sur ses aisselles elle tenta de la vendre, en vain, pendant 2 ans, sous le nom évocateur de “Odorono” odor oh no ! Mais ce fut l’échec… toujours.
L’expansion : de 1 à 3,5 milliards de déodorants en 100 ans
Ce n’est qu’après l'exposition d’Atlanta en 1912 que le succès commença à arriver pour Edna et son Odorono. Après 3 jours d’exposition, les gens eurent chauds, trop chauds et les déodorants Odorono partirent comme des petits pains.
La promesse a de quoi faire rêver : 3 jours sans transpirer ! Encore mieux que nos anti-transpirants actuels et pour cause : une composition plus que flippante de chlorure d’aluminium mêlé à de l’acide !
Aisselles irritées voire brulées, vêtements tachés … et des clients ou plutôt des clientes qui commencent à rouspéter.
Les 1ères campagnes de pub, vont vite fait étouffer les critiques, et fortement développer la marque. D’ailleurs elles valent le détour :)
Slogan que l’on pouvait voir sur des affiches des années 20 :
“ Si vous voulez garder votre homme mieux vaut ne pas sentir fort”
“ Le moment le plus humiliant de toute ma vie ”
“ Si vous recherchez l’amour ne laissez pas votre robe vous nuire avec son odeur d’aisselle”
“ Belle mais bête”
Utilisées au début pour convaincre les gens que bloquer la transpiration n’était pas malsain, les pubs sont rapidement ajustées pour faire culpabiliser les femmes qui n’utilisent pas de déodorant, et ça fait mouche !
Et les hommes dans tout ça ?
Eh bien ils s’en sortent plutôt bien car une odeur forte est encore perçue comme un signe de virilité. Mais business oblige, les 1er déo pour hommes arrivent en 1935. A destination des femmes qui veulent un mari qui sentent bon !
Entre les années 40-70, les marques s’engouffrent sur ce créneau et de nouveaux formats apparaissent : spray, stick, roll-on de quoi plaire à tout le monde...
Des pubs toujours plus culpabilisantes mais qui font vendre (beaucoup).
«à vue de nez, il est 5 heures"». Se laver ne suffit plus il faut également utiliser un déodorant (1970).
Aujourd’hui, les messages publicitaires ont heureusement évolués on parle désormais de fraîcheur pour les femmes, de pouvoir de séduction pour les hommes.
Ce qui permet d’écouler chaque année 3,5 milliards de déodorant dans le monde, soit le produit cosmétique le plus populaire.
Ah il est loin le temps de Napoléon... de nos jours l’Homme refuse les odeurs corporelles et s’en détourne avec dégoût, nous dit André Holley dans son livre “Eloge de l’odorat”. On les enlève et pourtant on ajoute des parfums aux notes animales synthétiques !
L’Homme devient de plus en plus “odeurophobe”, il y a des déodorants pour tout ! Les aisselles, les pieds, l’hygiène intime, l’haleine, les cheveux… à quand un déo pour les oreilles ?
Tout doit sentir le propre, sa maison, sa voiture, ses toilettes...
Même nos toutous ont droit à leur propre déodorant, les chanceux.
Alors que nous réserve l’avenir ? Un monde entièrement aseptisé ?
Quel sera le déodorant du futur ?
Les industriels pourront toujours inventer d’autres déodorants pour tout ce qui n’a pas encore été désodorisé. Ou créer le déodorant ultime, en pilule pourquoi pas, qui supprimera toute odeur corporelle à vie. Odeur qui pourra être remplacée par des parfums personnalisés et exclusifs.
Ça me fait penser à Grenouille dans “le parfum” de Suskind, personnage sans odeur et sans coeur à la recherche du parfum ultime !
Quoiqu’il en soit les anti-transpirants ont déjà reçu les premiers uppercuts, à base d’aluminium ils sont désormais dans les cordes, car potentiellement cancérigènes. A quoi bon se boucher les pores quand on sait que la transpiration (qui est vitale pour notre corps) ressortira ailleurs.
On assiste à une prise de conscience collective de l'aberration à utiliser des produits trop synthétiques pour de simples soins du quotidien, non vitaux.
Les problématiques environnementales également, vont faire évoluer les supports, l’ère du tout jetable entame la fin de son cycle. Les déodorants du futur seront durables, les contenants réutilisables, biodégradables ou n’existeront pas tout simplement.
Un retour aux produits plus basiques a déjà commencé, les gens veulent plus de transparence, plus de naturel et plus de simplicité. Les prochains déodorants répondront à cette demande.
Pourrons-nous un jour se passer de déodorant ?
Sûrement. Il ne sera plus nécessaire le jour ou nous assumerons entièrement notre odeur sans se soucier du regard des autres. Si on vous téléporte sur une île déserte avec une caisse de déodorant, en mettrez-vous ?
En attendant ce jour fatidique, les déodorants ont encore de beaux jours devant eux. Alors prenons soin de nous avec des déodorants naturels, à utiliser avec parcimonie, sans culpabiliser et surtout pour se faire plaisir.
Car avant tout c’est bien ça le rôle du déodorant, faire en sorte que l’on se sente bien dans son corps pour commencer une belle journée.